Dix ans après les attaques simultanées qui ont frappé Londres, l’émotion reste palpable. Les attentats terroristes du 7 juillet 2005, surnommés « the 7/7 bombings » outre-manche, semblent être le début d’une longue lutte contre le terrorisme et la barbarie sanglante. 52 victimes, plus de 700 blessés et des millions d’esprits marqués nous rappellent la violence de ce terrorisme « domestique » sur le sol britannique, laissant place à une montée en puissance d’Al-Qaida et des autres mouvements terroristes actuelles. Retour sur ces attaques qui ont meurtri une nation toute entière et sur l’état du service de défense, une décennie plus tard.
Les événements
8h47, c’est l’heure de pointe. L’été se fait sentir dans les rues de Londres où la chaleur se mêle avec une légère pluie fine. Au lendemain de la victoire de la ville dans l’organisation des Jeux Olympiques de 2012, des dizaines de milliers de londoniens s’engouffrent dans les stations de métro de la capitale britannique. Soudain, 3 déflagrations se font entendre dans 3 stations du centre de la ville, une première à Liverpool Street, une seconde à King’s Cross et enfin une troisième à Edgware Road. Mais l’horreur n’est pas terminée car une heure après la première explosion, à l’étage d’un bus impérial, un kamikaze se fait « exploser » à Tavistock Square. Le bus est complètement déchiqueté et 14 personnes sont tuées. Toute la journée, les transports publiques sont interrompus dans cette mégalopole de plus de 10 millions d’âmes. Au total se sont plus de 52 victimes qui ont perdu la vie dans ces attaques et plus de 700 blessés et mutilés sont transportés d’urgence dans les hôpitaux de la région londonienne. Les trois explosions du métro se sont déclenchés dans un délai de 50 secondes dans 3 stations différentes soulignant une préparation minutieuse de la part des jeunes terroristes. Surnommés « 7/7 » en Grande-Bretagne, les attentats de Londres s’inscrivent dans la série d’attaques à grande échelle contre des infrastructures civiles des années 2000, comme le 11 septembre 2001 à New York (2.977 morts, dont 67 Britanniques) ou le 11 mars 2004 à Madrid (191 morts).
« Soudain, une déflagration. J’ai été précipitée sur le sol. Deux hommes sont tombés sur moi. Je me suis relevée. Il y avait des débris de verre partout. » Jill Hicks
L’Aftermath des attentats
Une décennie plus tard les circonstances ont changé. Al-Qaida a laissé place à L’Etat Islamique (EI) et Londres a, depuis 2014, relevé son niveau d’alerte face à la menace terroriste liée à l‘Irak et à la Syrie. Cette mobilisation est justifiée par la menace terroriste représentée par les centaines de Britanniques aguerris au djihad en Irak et en Syrie. Les administrations du 10 Downing Street se sont succédées depuis 2005 avec des avancées sécuritaires considérables pour le pays. Les ex-Premiers ministres britanniques Tony Blair, Gordon Brown et l’actuel David Cameron ont mis les moyens économiques et gouvernementaux pour assurer une défense nationale du pays et de ses frontières. Un trio - qui fonctionne jusqu’a présent- constitué de défense, de sécurité et de surveillance. Ce dernier point est essentiel pour comprendre la percée du pays sur ses voisins européens d’un côté sécuritaire: on estime que la Grande-Bretagne détient plus de 5,5 millions de caméras publiques (ou semi-privés comme les CCTV qui peuvent être consultées par les forces de police). Soit aux alentours d’une caméra de surveillance pour 11 habitants.
Après des débuts fragiles, le peuple britannique a su prendre conscience de l’importance de ses outils de surveillance et des nouveaux modes de protections technologiques et civiles sur le territoire. Quitte à perdre une fraction de leur liberté, les Anglais, Écossais, Gallois et Irlandais du nord ne regrettent rien de ce choix stratégique et profitent d’une situation domestique assez favorable, même si le risque d’acte terroriste sur le sol britannique reste très élevé depuis les attentats de Paris et de Tunisie.
La Grande-Bretagne face au terrorisme d’aujourd’hui
Le budget dédié à la défense à lui aussi bondi depuis 2005 avec plus de 43 milliards de Livres sterling (soit 60 milliards d’Euros) consacrés à l’Armée, à la défense civile et aux aides de défenses étrangères et on peut même ajouter 14 milliards de Livres sterling pour la protection du pays (Police, R&D sécurité et ordre…) rien que pour 2015. Malgré une légère baisse depuis 4 ans doit cependant être notée, le budget lié à la défense représente 60 milliards de Livres sterling et se hissent au 4e rang mondial après les Etats-Unis, la Chine et la Russie. La France, elle est juste derrière, avec 81 milliards d’Euros.
Lors des commémorations l’an dernier, Le Premier ministre David Cameron a rappelé que le terrorisme « n’est pas un problème nouveau en Grande-Bretagne » en citant les exemples des attentats de Londres en juillet 2005 et, plus récemment, du « meurtre barbare » du soldat Lee Rigby. « Mais avec l’Etat islamique, nous sommes confrontés à la menace la plus grave que nous ayons jamais connue », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse aux 10 Downing Street.
Afin d’anticiper d’éventuelles futures attaques, la Police londonienne s’est entrainée dans une simulation d’attentat de grande envergure la semaine dernière, quelques jours après le massacre tunisien de civils à Sousse. Operation Strong Tower a réuni près de 1.000 policiers, soldats, membres des transports de la Metropolitan et semblent rassurer les Britanniques.
© Thomas Serre
Pour combattre cette menace permanente, Cameron a présenté depuis l’an dernier de nouvelles mesures pour contrer la venue de terroristes sur le sol britannique mais également des dispositions d’ordre judiciaires censées notamment « faciliter la confiscation de passeports. » Mais le gouvernement de David Cameron le sait pertinemment bien, il ne faut pas seulement se concentrer sur la venue d’islamistes radicaux ayant fait leurs armes au Yemen ou en Syrie, mais il est nécessaire de surveiller et filtrer les actes suspects sur le sol britannique et donc de généraliser une surveillance accrue pour les citoyens. Rappelons que 3 des 4 kamikazes des attentats de 2005 étaient nés et avaient grandi en Angleterre. L’endoctrinement religieux des jeunes britanniques qui partent désormais faire le Djihad en Syrie et en Irak ainsi que l’encadrement des condamnés sont également des défis auxquels David Cameron doit répondre rapidement.
Une menace qui augmente
Érigée au rang d’ennemi public numéro 1, l’organisation de l‘Etat islamique (EI) aurait causé le départ d’environs 600 jeunes britanniques dans les rangs de Daesh depuis 2014. « Avec l’EI, on se retrouve avec une organisation terroriste qui n’est pas hébergée par un pays précis mais qui cherche à établir et à étendre, de manière violente, son propre état terroriste. Nous pourrions nous retrouver avec un état terroriste aux bords de la Méditerranée. Cette ambition de créer un califat extrémiste représente une menace pour notre propre sécurité au Royaume-Uni », a ajouté David Cameron. Selon Scotland Yard et M. Cameron cette menace constitue la menace la « plus grave » à laquelle le Royaume-Uni ait jamais été confronté. Elle trouve ses origines dans « l’idéologie empoisonnée de l’islamisme extrémiste » qu’il faudra « probablement combattre pendant des années si ce n’est des décennies », a-t-il averti.
Enfin, le nouveau patron de l’agence britannique de surveillance (GCHQ) reprochait il y a quelques mois aux géants du web de faciliter la tâche des terroristes en ne coopérant pas assez avec les services de renseignement. En effet, dans un tribune du très sérieux Financial Times, Robert Hannigan affirme que Facebook, Twitter ou encore WhatsApp sont devenus « un véritable centre de contrôle et de commandement » pour les groupes terroristes comme l’EI et les criminels. Robert Hannigan considère que les entreprises privées ont autant de responsabilité que les pouvoirs publics dans la lutte contre le cyber-terrorisme. De plus, il ajoute que leur dominance sur le Web et dans les nouvelles technologies leur donnent un devoir de service public: celui de lutter contre le crime et le terrorisme et, par conséquent, de faciliter le travail des espions. Face a cette hypocrisie des services secrets britanniques, plusieurs firmes technologiques ont mis en place de nouveaux systèmes de protection des données pour regagner la confiance de leurs clients après les révélations d’Edward Snowden (NSA) il y a quelques mois. Ces nouvelles barrières de sécurité préoccupent les services de renseignements, et ils le font entendre haut et fort.
Des commémorations nationales
Ten years on from the 7/7 London attacks, the threat continues to be as real as it is deadly – but we will never be cowed by terrorism.
— David Cameron (@David_Cameron) July 7, 2015
2 semaines après les attentats de Sousse en Tunisie qui ont opté la vie à plus de 30 vacanciers britanniques, le Premier ministre britannique David Cameron a annoncé qu’un mémorial va être érigé pour rendre hommage aux 30 Britanniques tués dans l’attaque commise le 26 juin près de Sousse, en Tunisie
10 ans après les faits, le chagrin et l’émotion demeurent d’actualité au Royaume-Uni. La nation entière sera plongée dans le silence, à 11h30 (GMT) pour une minute de silence en mémoire des victimes. Le mémorial des attentats de Londres du 7 juillet 2005 érigé à Hyde Park commémorera avec sobriété l’anniversaire et une couronne de fleurs sera déposée.
Ci-dessous un documentaire de SkyNews sur les 10 ans des attaques de Londres, avec des témoignages forts en émotions des rescapés et l’analyse du bureau d’enquête au fil des années.