Mercredi, est sortie, chez Pygmalion : Celle qui murmurait à l’oreille du mec en costard de Laetitia Constant. 295 pages où Fauve raconte son métier de chuchoteuse pour chevaux, fait face à l’expulsion à cause d’un projet immobilier gigantesque et trouve l’amour ! Un brin de romance, un soupçon d’originalité, beaucoup d’humour : un bon roman pour l’été.
La passion selon Laetitia Constant
Celle qui murmurait à l’oreille du mec en costard n’est pas une romance clichée. Ici pas d’héroïne qui a un job branché, Fauve Albertini est chuchoteuse dans un haras. Elle soigne des chevaux traumatisés, tout en donnant des cours d’équitation responsable aux enfants. Elle n’est pas glamour, elle a tellement de cernes sous les yeux que sa meilleure amie l’envoi directement en vacances dès les premières pages du roman. Laetitia Constant fait de son personnage principale une femme forte et drôle. Fauve ne supporte pas l’avion et son voyage pour Ouarzazate fut un enfer. Certain(e)s se reconnaîtront peut-être ! La rencontre entre Fauve et l’homme de sa vie (oui bon ce n’était pas gagné au début) est pour le moins comique. Elle est assez partagée sur cet homme puisqu’elle le décrit en ces termes : « Cet électrisant Apollon était l’odieux connard de l’avion et il n’avait rien de commun avec un rongeur ». Bien que « Voisin » soit carrément sexy et plutôt sympathique, elle se rend vite compte qu’il n’est intéressé que par la mettre dans son lit. Après l’avoir recalé (ah ah j’avais dit femme forte) bien comme il faut c’est la fin des vacances et le retour à la réalité s’avère très sévère. Laetitia Constant parle d’une passion intense « Trop de combustion spontanée tuait la combustion spontanée », mais pour le moins conflictuelle. La vraie originalité demeure aussi dans le contexte de l’histoire. L’amour de Fauve pour ses chevaux paraît la plus forte : « Il est plus simple de chuchoter à l’oreille des chevaux que de le supporter ».
Un roman de rapports de force
Le livre de Laetitia Constant pose des questions plus profondes qu’une amourette. P96 Fauve reçoit un avis d’expulsion et c’est le début des emmerdes. Le village où se trouve notre héroïne va accueillir un centre de recherche biomédical. Pour faire de la place au projet immobilier, bons nombres de personnes vont être délogés. Fauve va vite déchanter après avoir été se plaindre auprès du maire. Passé cette déconvenue et voyant qu’il n’y a pas mieux à faire, elle va s’attaquer directement aux causes du problème. Elle va ainsi frapper à la porte de la société en charge du projet : Natur’vert Immobilier. Le décalage entre la ville et la campagne se fait directement sentir : « L’hôtesse me détailla des pieds à la tête. Ce matin, je m’étais habillée par habitude avec ma tenue de travail et l’avait gardée pour mon entretien avec le maire. Entre gens de la terre, on se comprenait. Cependant, tellement ébranlée et secouée par Célia, je n’avais pas réalisé que je partais pour la ville. La civilisation comme diraient certains ». La confrontation est à son climax quand Fauve rencontre enfin le puissant PDG Jonathan Granger. Ce dernier compte bien faire comme il l’entend et ne se laisse pas émouvoir : « Dehors ! Tonna-t-il. Je vais être très clair. Le chantier débutera comme prévu, et si ce n’est pour te glisser dans mon lit, je ne veux plus te voir ». Classe le monsieur au costard ! Comme rien ne fera bouger les lignes Fauve et sa meilleure amie Célia se décident à occuper la construction. Un projet qui n’est pas sans rappeler les événements de Notre-Dame-des-Landes. L’actualité est partout puisque le roman se conclut sur un incendie ravageur qui fait tristement écho à celui du Portugal. Celle qui murmurait à l’oreille du mec en costard parle donc autant d’amour que de protection de la nature.
Tous les mardis et vendredis, nos rédactrices de la rubrique littérature vous parlent d’un livre qu’elles ont aimé. Ne tardez plus, allez découvrir nos autres chroniques ! |