« Kin » propose une réflexion sur la complexité de l’identité sud-africaine postapartheid. A travers ce thème, le photographe Pieter Hugo met en scène l’intime, du 14 janvier au 26 avril 2015, à la Fondation Henri Cartier-Bresson.
« Kin » raconte l’intime. L’intimité à travers des photos de famille du photographe, des objets d’habitants d’Afrique du Sud, du pays en lui-même. C’est d’ailleurs un élément de la vie privée de Pieter Hugo qui est à l’origine de son travail : la naissance de son premier enfant, en 2006, et avec, les interrogations sur son pays. Comment endosser la responsabilité de l’histoire passée et dans quelle mesure doit-on le faire ? Comment élever un enfant dans une société si conflictuelle ? « Avant d’avoir des enfants, ces questions ne me gênaient pas ; maintenant elles m’interpellent », explique le photographe.

Pieter Hugo est né en 1976 à Johannesburg et a grandit au Cap, où il réside encore aujourd’hui. Il commence à s’intéresser à la photographie à 12 ans, lorsque l’Apartheid est proclamé en Afrique du Sud : il immortalise alors la peur et l’émotion qu’a suscité cet événement. A l’âge adulte, il commence à travailler en tant que photojournaliste puis se dirige rapidement vers une pratique photographique plus personnelle.
« J’essaye de montrer mon désir de regarder l’autre »
Le traitement de l’intime est né, pour le photographe, d’une envie de regarder et de s’impliquer dans un sujet. Il photographie d’abord ses proches : sa femme enceinte de leur 2ème enfant, son ancienne nourrice, perdue dans ses pensées, et même son nouveau-né et lui, nus sur un lit. Des portraits qu’il a voulu réalistes, pris dans une lumière naturelle.

L’intime passe aussi dans les photographies des paysages sud-africains et la vie dans le pays. Les photos de quartiers résidentiels protégés comme Dainfern côtoient celles des quartiers populaires d’Hilbrow.
Ici, l’intime passe par l’exposition de l’histoire nationale du pays, la colonisation, la diversité raciale, les disparités économiques. « Les Sud-Africains sont partagés sur mon travail. Parler de l’histoire nationale perturbe les gens, ils ne se sentent pas à l‘aise avec ça ».
Enfin, les natures mortes, dont Pieter Hugo dit avoir voulu renouveler le genre. Il les utilise comme portrait de la personne, comme un résumé de la vie du propriétaire de l’objet. Et à travers eux, les différences sociales. Hugo veut montrer « ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent rien ». Cela passe par les photographies de fauteuils déchirés, de cartons de pommes de terre à même un sol en terre à côté d’un joli vase de fleurs dans une maison cossue.

Cette très belle exposition montre bien la complexité pour ce photographe d’être attaché à un pays dont on ressent les anomalies, les difficultés et les fractures. « Regarder son pays avec un œil critique, c’est se regarder soi-même et regarder son prochain. Mon travail se heurte à un dilemme, mais échoue finalement à donner des réponses ».
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Image de Une : Périphérie de Pretoria, 2013