Dimanche dernier, je vous ai proposé la critique de Running up that bridge, sorte de Roméo et Juliette ultra revisité. Cette semaine, je suis allée à la rencontre de son auteure, Florie, qui nous prouve que la généralisation n’a plus sa place dans notre société… Auto-publication, métaphore filée, passion pour l’écriture, critique, elle nous dit tout. C’est donc sur Twitter que nous nous sommes données rendez-vous….

Que l’on soit d’accord ou non. Que l’on le veuille ou non. Internet est devenu une mine d’or pour les éditeurs. Communautés déjà créées. Auteurs déjà ciblés. On peut en penser ce que l’on veut. Mais ce que l’on n’a pas trop le droit de faire c’est juger sans connaitre ce qui se cache derrière, généraliser sans perdre la peine de prendre la peine, sans prendre le risque de passer à côté de l’exception qui confirme la règle, sans prendre le risque de franchir le pont juste une fois dans sa vie. Rencontre.

« Ce que je voulais, c’était de faire une histoire d’amour gay qui ne parle pas du fait d’être gay, juste une histoire d’amour. »

Florie auteure de Running that bridge

Écrire est-il une nécessité ou une envie soudaine ?

Florie : J’ai toujours écrit des histoires, mais les premières étaient plutôt mauvaises, je ne les ferai lire à personne ! Mais c’est toujours resté une passion, je ne pense pas que je serai capable de m’arrêter un jour.

Pourquoi tu as décidé d’écrire cette histoire, qui est quand même assez sombre ?

Florie : Running up that bridge est une réécriture moderne de Roméo et Juliette de William Shakespeare. Même si j’ai pris de nombreuses libertés dans cette réécriture, je ne pouvais pas enlever l’atmosphère de l’histoire. C’est une tragédie et je voulais que ça se ressente dans l’ambiance du livre. On peut trouver que tous les drames finissent par rendre l’histoire un peu « lourde », ce n’est pas faux, d’ailleurs, mais c’est un peu ce que je recherchais. Je pense que cette ambiance pesante fait partie de l’histoire justement, que tous les malheurs qui s’enchaînent rappellent qu’on est bel et bien dans une tragédie.

En un mot, décris-nous ton roman ?

Florie : Le pardon. Tout le roman tourne autour de la question : « Faut-il pardonner à l’autre clan ? ». Une question à laquelle ils ont du mal à répondre, d’ailleurs.

En un mot décris nous Daël ? Hugo ?

Florie : Égoïstes et totalement perdus, tous les deux. Je crois que j’ai un faible pour les anti-héros.

Ton personnage préféré ?

Florie : Sans hésiter, Grâce Rosenbach, la sœur d’Hugo. Je trouve son personnage complexe et difficile à cerner, c’est ce qui rend ses actions intéressantes, car on ne sait jamais vraiment comment elle va réagir.

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Comment t’es venue la thématique du pont ?

Florie : Pour être honnête, je n’avais pas vraiment réfléchi à la métaphore du pont (idée du chemin qui relie deux rives opposées) quand j’ai commencé l’histoire. C’était juste le lieu où se déroule le premier chapitre et leur rencontre, un élément central dans l’histoire. Au fil du temps, c’est presque devenu un personnage à part entière. La réflexion autour du pont s’est construite au fur et à mesure des chapitres.

Pourquoi avoir décidé de parler de l’homosexualité ?

Florie : En fait, je ne parle pas d’homosexualité en soi. Il s’agit d’une histoire d’amour homosexuelle, mais à aucun moment le thème de l’homosexualité est abordé (dans le sens, problème avec la famille, regards des autres, jugements). Ce que je voulais, c’était de faire une histoire d’amour gay qui ne parle pas du fait d’être gay, juste une histoire d’amour.

Pourquoi l’auto-publication ?

Florie : Comme je le disais, j’aime le principe de la fanfiction parce qu’elle est sur internet, accessible à tous. L’auto-publication peut donc entrer en contradiction avec ce principe, c’est pour cela que certaines personnes la critiquent. Généralement, après l’auto-publication, il existe une version en ligne et une version papier de l’histoire, ce n’est donc pas comme si on publiait pour que les gens l’achètent à tout prix, mais je comprends que chacun ait son avis là-dessus. L’auto-publication est une deuxième façon de faire vivre l’histoire et de la faire perdurer aussi. Le livre est matériel, il se garde sur le coin d’une étagère. Sur internet, qui sait, peut-être que dans quelques années elle sera effacée ou oubliée (très probablement oubliée d’ailleurs).

« La fanfiction offre des multiplicités de lectures, d’histoires, de versions revisitées, elle fédère des communautés de fans autour d’un imaginaire collectif qui forge justement l’identité du « groupe ». »
Clara, lectrice de Running up that bridge

Pourquoi sous forme de fanfiction ?

Florie : La fanfiction est un genre un peu à part. Les personnages sont connus d’avance, physiquement, ils existent déjà dans la tête des lecteurs. Généralement, on lit des fanfictions parce qu’on aime déjà tel ou tel couple. En fait, on se lance dans une histoire où les personnages principaux sont déjà légitimés auprès des lecteurs, puisque tout le monde s’attend à les voir ensemble.

Ce qui est intéressant dans ce genre, ce n’est pas forcément le fond de l’histoire, mais sa forme. La fanfiction est publiée sur internet, l’échange avec les lecteurs est donc omniprésent, les réseaux sociaux jouent un rôle également parce qu’ils permettent de partager l’histoire, de la faire vivre en dehors de la plateforme sur laquelle elle est postée. C’est ça qui m’a le plus attirée, de pouvoir parler de ce que je fais, de faire avancer l’histoire et de voir les réactions des lecteurs petit à petit. J’ai écrit un autre roman que je n’ai jamais posté sur internet. Ce n’est pas du tout la même expérience, ni le même ressenti. On n’écrit pas une fanfiction tout seul, les lecteurs font partie de l’histoire.

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Qu’est-ce que tu dirais à ceux qui critiquent ce genre ?

Florie : La fanfiction est pour beaucoup de personnes un genre illégitime, on imagine des fans groupies derrière leur écran incapables de vivre d’autres choses que de leurs idoles (Le sommes-nous ? Ce n’est pas la question). Internet est ouvert à tous, donc n’importe qui peut se lancer dans une fanfiction. Il n’y a personne derrière pour « légitimer » l’histoire, je pense que c’est pour cela que ce n’est pas pris au sérieux… Peut-être d’ailleurs parce que ce n’est pas forcément ce qu’on cherche quand on en lit une. La fanfiction, c’est avant tout pour s’amuser avec les personnes qui partagent les mêmes passions, goûts, attentes. Elle offre des multiplicités de lectures, d’histoires, de versions revisitées, elle fédère des communautés de fans autour d’un imaginaire collectif qui forge justement l’identité du « groupe ».

Et enfin…. Si ton histoire doit être publié par un éditeur ?

Florie : Le rêve… Je crois que j’aurais du mal à réaliser ce qu’il m’arrive, mais je serais vraiment très heureuse.

Si vous voulez « traverser le pont », donnez une chance à Running up that bridge par là : Lulu.com ou ici pour la version en ligne

Pour lire la critique du livre, rendez-vous encore sur L’Etudiant Autonome !

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Rencontre avec Florie, auteure de Running up that bridge

par Sonia Malek Temps de lecture : 5 min
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