J’avais 18 ans et j’avais rendez-vous avec mon nouveau banquier, Jérôme. Quand je le vis apparaître, j’ai été tout de suite séduite. Grand, brun, il avait un léger cheveu sur la langue que je trouvais très craquant. Je ne savais pas encore que je venais de rencontrer l’amour. Le seul, le vrai, l’incendiaire. Celui qui vous donne tout avant de tout vous reprendre. Celui qui illumine une vie.
Il était beaucoup plus âgé, et j’étais très embarrassée d’être autant attirée par lui, mais plus le temps passait plus il me mettait à l’aise, j’avais l’impression qu’une connexion était en train de se créer. Nous avons passé plusieurs heures à parler dans son bureau de tout sauf de la raison pour laquelle j’étais venue. Lui dire ? Non, au contraire, ça me ferait une bonne raison de revenir !
La mère de ma meilleure amie est la collègue de Jérôme, j’en ai profité pour aller à la pêche aux informations. J’aurais dû m’abstenir : elle m’apprit qu’il avait une femme, et qu’en plus, elle était enceinte. J’étais abasourdie par la nouvelle, mais quelque chose en moi me disait que ce n’était pas possible. Jérôme était l’homme de ma vie.
Bien évidemment, tous mes amis se moquaient de moi et pensaient que je fabulais lorsque je leur racontais cette alchimie qui étincelait entre nous deux. Ils voyaient le banquier, je voyais l’homme.
Secrètement, je m’imaginais avec lui, j’étais bercée par l’illusion d’un avenir à deux. Puis je les ai vus, tous les trois, heureux. Ce fut la douche froide. Mais comme le dit Elie Ben Gal « qui sème l’illusion récolte la souffrance ». Pendant plusieurs semaines, j’étais anéantie, cet homme que je connaissais à peine était entré en moi sans que je puisse m’en défaire. Pourquoi croise-t-on des milliers de personnes et ne s’éprend-on que d’une seule (qui plus est, un déjà marié) ?
Je suis partie vivre à Paris où j’ai rencontré d’autres hommes, avec qui je n’ai réussi à entreprendre que des relations platoniques. Je n’ai jamais voulu me donner à un homme, le seul que je voulais, c’était Jérôme. Si ce n’est pas Lui, ce ne serait personne.
J’allais partir vivre à New York, et j’avais besoin d’une nouvelle carte bleue. Malgré mon manque d’enthousiasme, je devais absolument prendre rendez-vous avec Jérôme. Lorsque je lui ai annoncé mon départ, j’ai vu son visage s’assombrir mais je n’en fis qu’une formalité - tout ça ce n’était que dans ma tête.
Arrivée à New-York, je reçus un mail … de lui.
« J’espère que vous avez fait bon vol. Donnez-moi de vos nouvelles, cela me ferait très plaisir. Jérôme »
Ce n’était pas grand-chose, et en même temps c’était beaucoup. Rien n’est jamais anodin.
Après ce mail, ont suivi bien d’autres durant l’année, toujours très courtois. Il avait quelqu’un dans sa vie, et je n’étais pas une briseuse de ménage.
De retour en France, j’ai fait ma vie sans vraiment l’oublier, puis j’ai appris qu’il avait rompu avec sa compagne, mais il fallait que je l’oublie une bonne fois pour toute. Il ne pourrait jamais rien se passer. Il avait un bébé, nous avions dix ans de différence. J’essayais de me convaincre qu’il n’était pas fait pour moi. Jusqu’à ce que, partie en week-end dans mon village natal, je le croise dans la rue. Je compris alors que ni le temps, ni la distance n’avait tempéré mon amour.
Après six années d’attente, il m’a finalement invité à dîner. Un dîner qui ne s’est jamais terminé, puisque nous sommes encore ensemble.
Il a suffi d’un instant. Un regard. Une rencontre, pour bouleverser une existence. La bonne personne, le bon moment. Il a suffi d’écouter mon cœur.