Depuis le vendredi 4 mars, une « affaire » secoue votre poste de télévision, et pas seulement. Une seule enquête publiée et le tour est joué. Tout le monde pensait l’émission Touche Pas À Mon Poste intouchable et indétrônable, et pourtant elle est plus que jamais en danger. Si vous n’avez pas réussi à suivre les moult rebondissements entre le magazine Society et l’émission-phare de D8 présentée par Cyril Hanouna, l’Étudiant Autonome vous offre une séance de rattrapage.
Petite chronologie du Hanouna-gate
Vendredi 4 mars : publication d’une enquête pour le moins accablante dans le magazine « quinzomadaire » Society (édité par So Press au même titre que So Foot ou encore So Film). Ces huit pages font grand bruit dans le paysage médiatique français, notamment avec le témoignage de plusieurs « chroniqueurs anonymes » décrivant Cyril Hanouna comme un tyran et s’inquiétant de l’avenir de l’émission Touche Pas À Mon Poste, tant la pression serait importante autour de l’équipe et même sur les frêles épaules de la rédaction et des techniciens. Dès la sortie du magazine, les « fanzouzes », comme on les appelle dans le milieu, se mobilisent immédiatement sur Twitter avec le hashtag #OnAimeCyril.
Lundi 7 mars : contre-attaque de Cyril Hanouna et de son équipe. Dans son émission quotidienne, Hanouna lance un débat pour réagir à l’enquête publiée trois jours avant et surtout pour essayer de démentir la plupart des infos balancées dans Society. Il met les choses au point avec ses chroniqueurs (qui sont exceptionnellement tous présents autour de la table) et attend leurs réactions à propos des échos dans la presse. Son équipe le défend à coup d’éloges et rassure les téléspectateurs quant au plaisir qu’ils éprouvent chaque soir à participer à TPMP.
Dans le même temps, Franck Annese, patron de Society, publie un tweet dans lequel il assure qu’il est en mesure de céder quelques enregistrements pour appuyer l’enquête de son journal. Vague de panique sur les réseaux sociaux, Cyril Hanouna et son équipe ne faiblissent pas et maintiennent leurs propos.
Une vaste enquête est menée sur le net pour démasquer le chroniqueur anonyme qui aurait critiqué largement l’émission et son animateur. Un auteur de l’enquête publiée par Society annonce qu’il s’agit d’un « historique de l’émission », ce qui relance de plus belle les interrogations sur l’identité de la « taupe ».
Mardi 8 mars : annonce en direct du départ de Bertrand Chameroy de l’émission dans laquelle il a sa place depuis 4 ans maintenant. Selon ses dires, il quitte l’émission à cause de sa surmédiatisation depuis notamment différentes enquêtes à charge dans lesquelles il était impliqué de près ou de loin. Cyril Hanouna complète son témoignage en invoquant la jeunesse du chroniqueur et ses difficultés à supporter une telle pression au quotidien. Mais certains interpréteront son départ comme une fuite, comme s’il avait quelque chose à se reprocher. Il devient alors, dans la tête des téléspectateurs, le suspect n°1 concernant les témoignages accablants publiés cinq jours auparavant. Ce départ précipité est un coup de tonnerre dans le PAF : Hanouna aurait été informé de cette décision seulement quelques minutes avant l’émission, c’est donc une totale surprise pour la plupart des autres chroniqueurs. Beaucoup pensent que ce départ aurait été volontairement précipité suite à l’enquête sur TPMP dans Society.
Mercredi 9 mars : en fin de journée, deux tweets de Cyril Hanouna et de Bertrand Chameroy viennent rassurer les téléspectateurs. Alors que l’animateur vedette était suspecté d’avoir lui-même viré le jeune homme (qui aurait pu balancer des infos à Society), il clame son innocence et ne comprend pas comment ses « fanzouzes » peuvent le penser capable d’un tel acte. Selon lui, il a tout fait pour la réussite de Bertrand à la télé et c’est grâce à lui qu’il est maintenant connu du grand public. Bertrand Chameroy confirme la version de son (ancien) boss et assure que ce départ est une décision qui vient uniquement de lui, personne n’aurait influencé son choix. Les révélations de Society auraient néanmoins précipité son départ.
Samedi 12 mars : déclaration ravageante d’une ex-intermittente de l’émission. Comme si tous ces témoignages accablants ne suffisaient pas, Sophie Tissier, ancienne employée de l’émission Touche Pas À Mon Poste, publie un statut sur son compte Facebook où elle accuse Cyril Hanouna et la chaîne D8 elle-même de maltraitance envers ses salariés, voire d’humiliation et de harcèlement. Selon elle, certains techniciens sortiraient de la régie en pleurs certains soirs, et l’organisation de l’émission se ferait au tout dernier moment. Elle parle même de licenciement abusif et rappelle qu’elle a réussi à gagner son procès contre le groupe Canal + (le 1er mars dernier) pour « abus de contrats précaires » et « licenciement sans cause réelle et sérieuse ». Elle défend même le jeune Bertrand Chameroy en assurant qu’un réel malaise s’est formé autour de l’émission et qu’Hanouna et son équipe de chroniqueurs sont détestés de leur milieu professionnel.
Qui dit vrai ?
Cyril Hanouna a un avantage de poids dans cette affaire : sa communauté. Avec ses plus de trois millions de followers sur Twitter et les quelques millions de téléspectateurs présents chaque soir devant Touche Pas À Mon Poste, il peut compter sur tous ses fans pour le soutenir face aux accusations de plus en plus nombreuses. On pourrait néanmoins douter de sa sincérité car l’affaire Society n’est pas le premier problème que rencontre l’animateur cette année : il est notamment victime de plusieurs plaintes (dont une mettant en cause Enora Malagré, une de ses célèbres chroniqueuses) pour des violences verbales et d’une enquête menée par TéléObs (filiale du Nouvel Obs) concernant des cadeaux pour des téléspectateurs qui ne seraient jamais arrivés à destination. Le départ précipité de Bertrand Chameroy arrive également au mauvais moment et relance les soupçons contre cette équipe qui bat tous les records d’audience. On peut évidemment penser qu’un tel succès provoque énormément de jalousie et que le moindre prétexte est bon pour tenter de détrôner le « caïd du PAF ». Ou alors que ce même succès est monté à la tête de l’animateur qui a commencé sur Comédie! et qu’il se pense définitivement invincible…
Franck Annese, le boss de Society, est quant à lui en possession d’enregistrements pour soutenir et légitimer l’enquête de son journal. Bien sûr, selon une certaine déontologie journalistique (déontolo-quoi ?), il ne peut pas les dévoiler et est bien obligé de les garder comme une certaine menace invisible. Ce qui pose également problème, c’est que la plupart de ceux qui critiquent cette enquête ne l’ont jamais lue en entier. Ils ne la connaissent que via les autres médias et le peu d’extraits qui en ont été diffusés un peu partout ces derniers temps. Or, cette enquête ne fait pas qu’accuser Cyril Hanouna, elle explique surtout les rouages de son succès et décortique son quotidien au sein de ses différentes équipes (à la radio sur Europe 1 dans Les Pieds Dans Le Plat, à la télé sur D8 dans Touche Pas À Mon Poste mais aussi dans sa propre société de production, H2O). On peut aussi se dire qu’en ce moment, parler de TPMP (surtout en créant une polémique pareille) est un des meilleurs moyens de faire parler de soi. Et puis, n’oublions pas que Society est un magazine très jeune (il vient tout juste de fêter son premier anniversaire) et quelques abonnés de plus ne lui feraient certainement pas de mal…
Une chose est sûre, vous n’avez pas fini d’entendre parler de ce Hanounagate entre l’animateur Cyril Hanouna et le magazine quinzomadaire Society. Tant que l’émission médias Touche Pas À Mon Poste fera de tels scores d’audience tous les soirs, elle sera toujours la cible des critiques et plus personne ne saura démêler le vrai du faux. Mais au final, « la télé c’est que d’la télé » comme dirait l’autre…
Bastien Munch